« Après, je ferai mon autonomie… »  https://youtu.be/SWN6EspwLSk

 

Dans une vidéo du CRéSaM, cette jeune fille, chahutée, bousculée par les services et acteurs de la Protection de l’Enfance et de la santé nous dit qu’après un séjour de rupture elle « fera son autonomie ». Ainsi elle reprend le discours des professionnels, comme pour les rassurer. Ces discours sur l’autonomie donnent aux professionnels du contenu mesurable à leurs taches, aux protocoles issus de « synthèse » ou l’on a énuméré les habilités sociales, comportementales….  Une captation de l’angoisse de l’accompagnant.

« Gérer sa vie » serait une liste d’aptitudes, de capacités à faire… seul. En prendre la mesure permet des graphiques, l’entrée dans des logiciels traitant les apprentissages à mettre en œuvre. Voilà que par la mesure, les autorités mandatées et les accompagnants, se rassurent sur leur propre autonomie, me semble-t-il. Sans doute davantage pour eux que pour le jeune qui défie sans cesse les limites des services et des membres du personnel.

Un inventaire des situations utilisables par cette jeune pour faire des accompagnants qui lui sont désignés des complices de son « sur place » grâce aux défis à la règle qu’ils sont censés tenir, mesurer.  Démarche qu’on appelle souvent abusivement « contenir ».

 

Il est question d’apprivoiser la solitude, la peur d’être seul, l’angoisse sans doute. Se confronter aux limites des idées et paroles que l’on est capable de se dire pour contenir et transformer l’émotion ancienne, burinée par les ruptures précoces et répétées. 

« Contenir » c’est se mettre à l’écoute et à l’accueil, « tu es le bienvenu avec toutes tes émotions, je ne m’enfuirai pas ». TENIR cette place nécessite bien souvent de l’inter-institutionnalisation, ce qui semble plus difficile encore en période dite de transition.

Voilà l’expérience à vivre, dans la relation d’abord, pour la mettre en action de soi à soi, pour devenir autonome.

Nous les soignants, les accompagnants… ou en sommes-nous de cette question ?

Si ce n’est pas le cas, sans les regards croisés à l’intérieur de notre service, de notre équipe, sans l’exercice d’une tiercité circulante et bienveillante, nous pourrions exiger de cette jeune une performance humaine que je n’ai peut-être pas. Je risquerais bien de tenter à travers elle (épi-scénario) d’accomplir cette démarche qui est celle que j’ai à faire. Ce n’est pas très rassurant. Ce temps d’intervision est-il accepté comme du travail ?

Nous n’en demandons pas tant à nos enfants qui ont expérimenté un attachement sécure, la permanence et la protection.

Si nous même n’en n’avons pas tout à fait terminé de cette compétence à être rassurant pour nous-même… nous pourrions précipiter cette jeune à devenir « autonome » pressé par l’arrivée de la limite de l’âge, par les compétences et réglementations des administrations peu enclines à co-construire dans la temporalité du jeune.

Luc Fouarge